Le terme d’isolement en appelle un autre : la solitude. Quelle différence y-a-t-il entre ces deux termes ? Comment un sentiment d’isolement peut-il naître au bureau alors que les espaces de travail sont par définition un lieu de rencontres, d’échanges, de communications ? Un premier élément de réponse : l’isolement est un sentiment subi alors que la solitude est souvent le fruit d’une volonté pour réfléchir, se concentrer… L’isolement intègre une notion de coupure avec les autres membres de son entreprise. La solitude intègre une volonté de recentrage et de réflexion, ou comme le souligne Marc Lévy : « La solitude peut être une forme de compagnie ». Comment reconnaître le symptôme d’isolement tant physique que psychique à l’heure du travail collaboratif ?
Le décloisonnement des bureaux avait pour l’un de ses objectifs celui de sortir de l’isolement les salariés. Ainsi les bureaux ouverts proposaient aux salariés de ne plus se sentir isoler et vivre pleinement au cœur de l’entreprise. Mais peut-on travailler en collaboration et ressentir un sentiment d’isolement, ou, est-ce incompatible ? Effectivement, rapidement, ces espaces ont eu pour effet, certes de sortir de l’isolement certains salariés, mais à contrario il n’existait plus aucune possibilité de solitude, situation salutaire pour se concentrer, réfléchir, créer, innover… Le collaboratif à tout crin peut ainsi paradoxalement isoler car certains ne sauront plus travailler efficacement sans trouver des espaces de solitude au bureau. C’est à ce stade que l’évolution des espaces de travail est intéressante. Par exemple, le flex-office permet en autre de choisir selon ses tâches de pouvoir s’isoler volontairement pour dans la solitude réaliser une tâche propre qu’elle soit exécutive ou réflective. Ainsi l’isolement peut être ressenti positivement lorsqu’il est choisi et volontaire, à l’instar de la sagesse confucéenne « Pas trop d’isolement ; pas trop de relations ; le juste milieu voilà la sagesse »
Alors que des espaces peuvent isoler de part leur cloisons rigides ou paradoxalement par le manque de solitude possible, les espaces de travail ont complétement intégré ces deux notions afin que les salariés en fonction de leur profil, mais aussi de leur fonction puisse moduler leurs approches de collaboratives à solitaires. Les nouveaux espaces dits flexibles peuvent se matérialiser par des parois mobiles, des caissons d’isolement, des salles dédiées… mais pas seulement. Apparaissent de nouveaux concepts d’espaces favorisant d’une part le lien entre les salariés mais aussi favorisant la gestion des stress potentiels. Ces stress potentiels qui peuvent être à l’origine de sentiment d’isolement vont pouvoir être circonscrits par des propositions d’incitation à participer à des séances de relaxation (yoga, sophrologie, réflexologie..) mais aussi l’apparition de salles de jeux, plus calme de lecture… Le développement des Chief Happines Officer (Manager du Bonheur) indique une tendance de fond des entreprises qui souhaitent mettre en œuvre des espaces adaptés à tous les profils de ses salariés pour la meilleure des intégrations possibles.
Une entreprise s’attachera à surveiller les risques d’isolement de ses salariés, afin de prévenir de ses conséquences négatives pour la bonne marche de celle-ci. En revanche, elle aura à cœur de protéger les moments de solitude volontaire et choisi par les salariés. Un subtil dosage pour des espaces de travail accueillant et porteur d’énergie. Parce que « la solitude est propice aux révélations de l’esprit* », les entreprises n’ont pas à craindre les salariés nécessiteux de calme et d’isolement tant qu’il est voulu et librement choisi.
*Jacques Chardonne